
La marque bleue indique le paragraphe de référence dans le Rapport Mapping
258. Les premiers réfugiés sont arrivés dans la province de l’Équateur en décembre 1996. Ce premier groupe comprenait principalement de hauts dignitaires civils et militaires de l’ancien régime rwandais. Ils sont rapidement partis jusqu’à Zongo via Gemena ou Gbadolite puis ont traversé l’Oubangui pour arriver en République centrafricaine. Les réfugiés, pour la plupart, n’ont atteint la province de l’Équateur qu’en mars et avril 1997. Ils sont arrivés à pied après avoir traversé la forêt à l’ouest de l’axe Kisangani-Ubundu et ont pris la route en direction d’Ikela. Ils ont progressé ensuite à l’intérieur de la province en suivant l’axe Ikela-Boende, dans le district de la Tshuapa. Ils se déplaçaient, pour la plupart, en groupes de 50 à 200 personnes, accompagnés de quelques hommes armés. Certains groupes étaient constitués exclusivement d’ex-FAR et de miliciens Interahamwe. Comme dans les autres provinces, lors de leur passage dans les villages, ces derniers ont commis des exactions à l’encontre de la population civile. Les militaires de l’AFDL/APR ont, de leur côté, atteint la province de l’Équateur au cours d’avril en passant par Isangi puis Djolu.
259. Les troupes de l’AFDL/APR ont continué à tuer des réfugiés dans la région de Boende tout au long de mai, juin et juillet 1997306.
260. Après la prise de Boende par les troupes de l’AFDL/APR, les réfugiés qui se trouvaient sur l’axe Ikela, en amont de la ville, se sont enfuis dans plusieurs directions. Certains sont partis vers Monkoto, à 218 kilomètres au sud de Boende, ont traversé le fleuve Zaïre au niveau de Loukolela et ont fini par atteindre le Congo-Brazzaville. D’autres sont partis en direction du nord et sont arrivés à Basankusu via Befale. La plupart ont continué de progresser vers l’ouest en direction d’Ingende et de Mbandaka tandis que les militaires de l’AFDL/APR se mettaient à leur poursuite.
261. Vers la fin avril 1997, des milliers de réfugiés étaient concentrés sur la rive droite de la rivière Ruki, dans l’attente d’un bateau pour Mbandaka. En deux rotations, les 1er et 8 mai, le bac d’Ingende réquisitionné à cet effet par le Gouverneur militaire a pu évacuer 4 200 d’entre eux jusqu’à Irebu et l'ancien centre militaire des forces navales situé à 120 kilomètres au sud de Mbandaka. D’autres sont partis en pirogue ou à pied jusqu'à Mbandaka. Les plus faibles et les malades, en revanche, n’ont pas pu quitter la zone avant l'arrivée des militaires de l'AFDL/APR.
262. Après avoir passé la nuit du 12 au 13 mai dans le village de Kalamba, les troupes de l’AFDL/APR ont atteint Wendji, à 20 kilomètres de Mbandaka. Six mille réfugiés vivaient dans ce village dans un camp de fortune mis en place par la Croix-Rouge locale près d’une ancienne usine de la Société équatoriale congolaise Lulonga-Ikelemba (SECLI). Ils n’étaient pas armés car la gendarmerie avait confisqué leurs armes. Sous l’égide de l’évêque de Mbandaka, un Comité d’assistance et de rapatriement, composé de membres de l’Église catholique et protestante, ainsi que de MSF, du CICR et de Caritas, ont tenté d’aider les réfugiés mais, face à la progression rapide des troupes de l’AFDL/APR en direction de la zone, le Comité avait décidé d’organiser l’évacuation des réfugiés sur Irebu.
263. Tandis qu’un premier groupe de militaires de l’AFDL/APR massacrait les réfugiés à Wendji, un autre a pris la direction de Mbandaka à bord de deux camions.
264. Le 13 mai 1997, vers 10 heures, plusieurs centaines de réfugiés sont arrivés dans les rues de Mbandaka en courant.
265. Les militaires sont ensuite entrés dans l’enceinte du port d’ONATRA où de nombreux réfugiés attendaient depuis quelques jours d'embarquer pour Irebu.
266. Les rescapés des différents massacres commis dans le sud de l’Équateur ont finalement été réinstallés dans un camp situé sur l’aéroport de Mbandaka. À compter du 22 mai 1997, 13 000 réfugiés ont pu ainsi être rapatriés au Rwanda. Les réfugiés rwandais qui ont réussi à traverser le fleuve Zaïre se sont installés en République du Congo pour la plupart, dans trois camps situés à environ 600 kilomètres au nord de Brazzaville: Loukolela (6 500 réfugiés), Liranga (5 500) et Ndjoundou (3500).
267. Au cours du second semestre de 1997, les autorités nationales et provinciales du nouveau régime ont entravé systématiquement les travaux de la Mission d’enquête du Secrétaire général qui tentait de faire la lumière sur les massacres de Wendji et Mbandaka. En novembre, le Gouverneur de la province de l’Équateur, Mola Motya a fait déterrer les ossements humains de la fosse commune de Bolenge afin de faire disparaître les preuves avant que les enquêteurs des Nations Unies ne puissent se rendre sur le terrain. Le Ministre de l'intérieur a facilité ce travail d'exhumation en imposant, le 13 novembre, un couvre-feu dans la ville de Mbandaka.
268. Les massacres de Wendji et Mbandaka ont mis en évidence l’acharnement avec lequel les militaires de l’AFDL/APR ont tué les réfugiés. Si, au cours de leur fuite à travers le Congo-Zaïre, les réfugiés étaient souvent mêlés à des éléments des ex-FAR/Interahamwe, à l’arrivée des militaires de l’AFDL/APR à Mbandaka et à Wendji, les ex-FAR/Interahamwe avaient pour la plupart déjà quitté la zone tout comme les militaires des FAZ. Malgré cela, les militaires de l’AFDL/APR ont continué de traiter les réfugiés comme des combattants armés et des objectifs militaires.
306 AEFJN, Rapport sur les violations des droits de l’homme dans le sud de l’Équateur, 30 septembre 1997.